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L'album de regards sur la vie, le monde, la quotidien et l'actualité. Ancien blog de Jacques Beaumier.

Cadeau du jour

Publié le 20 Juin 2007 par Smara

Reçu d'une collègue de bureau croisée au moment de mon arrivée, qui me dit : "Quand je te vois le matin, je me dis que le bonheur existe !". Et bien c'est pour moi un beau compliment, parce que je suis convaincu que le bonheur n'est pas tant dans ce que le hasard nous donne à vivre, ni même dans ce que nous arrivons à réaliser, que dans notre façon de vivre les choses et le regard que l'on porte sur le monde, sur les autres et sur soi-même. Et en ce qui me concerne ça n'est pas venu tout seul ! Il a fallu développer lentement, au fil des années, une capacité d'acceptation des choses et de mes limites qui ne m'empêche pas d'agir, et de réagir quand ça ne me plaît pas, mais qui me protège de l'angoisse et de la frustration de l'échec. Et petit à petit un certain détachement s'installe, qui permet de traverser la vie en marcheur plus intéressé aux détails du paysage qu'au but de l'itinéraire ou à la moyenne journalière. Comme dit Nicolas Bouvier dans "L'usage du monde" : "Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu'il se suffit à lui-même".

J'en profite pour vous livrer un petit extrait de ce récit qui, parlant du voyage me parle de la vie tout entière : "Le voyage fournit des occasions de s'ébrouer mais pas, comme on le croyait, la liberté. Il fait plutôt éprouver une sorte de réduction ; privé de son cadre habituel, dépouillé de ses habitudes comme d'un volumineux emballage, le voyageur se trouve ramené à de plus humbles proportions. Plus ouvert aussi à la curiosité, à l'intuition et au coup de foudre. Ainsi un matin, sans savoir pourquoi, nous emboitâmes le pas à une pouliche qu'un paysan venait d'aller laver à la rivière. Une pouliche haute sur jambes, les yeux comme des marrons dans leur coque entrouverte, et une robe sans défaut sous laquelle les muscles jouaient avec une coquetterie souveraine. Ce que j'avais vu de plus femme en Yougoslavie. Dans la rue, les boutiquiers se retournaient sur elle. Nous l'avons suivie en silence comme deux vieux "marcheurs" éperdus, le coeur entre les dents. Parce que l'oeil à besoin de ces choses intactes et neuves qu'on trouve dans la nature : les pousses gonflées du tabac, l'oreille soyeuse des ânes".